Marc Caussidière : du pavé stéphanois à la préfecture de police
Devenir préfet de police de Paris n’était certainement pas inscrit dans les perspectives d’avenir du jeune Louis Marc Caussidière. Ni son cursus professionnel et encore moins ses opinions politiques ne lui permettaient de l’envisager. Marc Caussidière fait partie de ces hommes que les circonstances, en particulier dans des périodes troublées, projettent sur le devant de la scène révélant ainsi leurs qualités. Né le 18 mai 1808 à Lyon (Rhône) dans une famille d'artisans, marié à Caroline Dutertre, il travaille très tôt dans des fabriques (notamment de soieries) de Lyon et de Saint-Etienne. Il se révèle pleinement comme révolutionnaire lors des révoltes des Canuts d’avril 1834, auxquelles il participe, en particulier, à Saint-Etienne. Les ouvriers stéphanois tentent de rejoindre leur camarade lyonnais en grève contre La baisse sur les salaires décidée par les chefs de fabrique au début de l’année 1834. Le 9 avril, jour où commence devant les tribunaux le procès des chefs d’ateliers et des ouvriers poursuivis à la suite de la grève de février, est également celui de la cessation du travail. Cette grève se transforme en une insurrection qui dure six jours et se termine par la défaite des ouvriers et des républicains. Il y eut de nombreux morts et blessés et quatre cents arrestations. Déjà, le 19 février, quelques républicains qui chantaient “La Marseillaise” se trouvèrent aux prises avec la police qui leur signifia d’avoir à se disperser. Le lendemain, la foule se réunit dans la rue et entonna l’hymne de Rouget de Lisle. La police intervint et des manifestants furent arrêtés. On voulut les incarcérer mais, devant la prison, leurs camarades tentèrent de les délivrer. Une violente bagarre éclata. Plusieurs manifestants furent blessés à coup de baïonnette, et un agent fut tué d’un coup de couteau. Une centaine d’arrestations eut lieu par la suite. Parmi les personnes arrêtées se trouvait Caussidière, le chef des républicains stéphanois qu’on essaya de rendre responsable du décès de l’agent. Caussidière eut d’ailleurs une attitude courageuse. Dans une lettre qui fut publiée quelques jours après, il revendiqua la responsabilité d’avoir organisé la manifestation pour protester contre l’interdiction du chant “La Marseillaise”. Il déclara également que les manifestants avaient eu raison de se défendre contre les brutalités de la police. Condamné, il est incarcèré au Mont-Saint-Michel. Il tente de s’évader. Son compagnon de fuite s’étant blessé, il renonce. Il bénéficie de l'amnistie générale de 1837. Il met à profit son métier de courtier en vins et eaux-de-vie au bénéfice du journal radical la « Réforme », en qualité de « voyageur » chargé de recruter abonnés et actionnaires. Ce qu’il fait avec un succès certain. On le retrouve à Paris, en 1839, où il conspire et fait partie de groupes et de sociétés sécrètes républicains. Le 24 février 1848, Caussidière prend le fusil, monte sur les barricades et occupe la préfecture de police. Il est nommé le même jour, délégué́ de la République au département de la Police, le 29 février 1848, délégué à l’administration de la police de la Seine, nommé par le maire de Paris et le
17 mars, préfet de police, dépendant directement du ministre de l’intérieur. A ce poste, il remplace les sergents de ville par les gardiens de Paris et crée, pour la garde de la préfecture, le corps des « Montagnards » composé de quatre compagnies rassemblant d'anciens membres des sociétés secrètes, d'anciens prisonniers politiques et des révolutionnaires résolus. Ils sont vêtus d'un uniforme original : blouse bleue, ceinture et cravate rouges. Élu du département de la Seine à l'Assemblée Constituante (23 avril 1848) tout en demeurant préfet de police, il reste dans une expectative suspecte lors de la journée insurrectionnelle (envahissement du Palais-Bourbon et de ministères) du 15 mai 1848 et se voit bientôt accusé d'en être le complice. Démis de ses fonctions de préfet de police, démissionnaire de son mandat de député, il se fait toutefois réélire représentant du département de la Seine lors de l'élection complémentaire du 4 juin 1848 par une forte majorité (147 400 voix pour 248 400 inscrits). Il reprend place à la Montagne, vote le 28 juillet contre le décret sur les clubs. Il monte à la tribune pour se défendre contre les accusations portées contre lui, mais l'Assemblée, ayant autorisé les poursuites à son encontre, vu le réquisitoire du procureur général lui attribuant la responsabilité des évènements du 15 mai, il prend la fuite et se réfugie à Londres, puis aux États-Unis où il reprend ses activités de courtage en liquides. La Haute Cour de Justice de Bourges le condamne par contumace à la déportation pour son implication dans la journée révolutionnaire du 15 mai 1848. Il écrit et publie ses Mémoires et ne revient à Paris qu'après l'amnistie de 1859, avant de décéder en janvier 1861. Il a sa rue à Saint-Etienne, au-dessus du quartier de Montaud.
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